Dossier: Un mental fort

Conseils contre la déprime

Parfois, tout va pour le mieux. Parfois, rien ne va. Tout le monde connaît des phases de déprime. Tant que les nuages gris ne font que passer, il n’y a aucune raison de s’inquiéter. Nos expertes nous expliquent comment sortir de la déprime – voire comment s’en préserver.

Texte: Julie Freudiger; photo: Sanitas

Le ciel n’est pas toujours bleu et sans nuages. Quand les contraintes augmentent, qu’il s’agisse du stress de la vie quotidienne, de disputes au sein de la famille ou d’une perte d’emploi, l’humeur en pâtit. C’est normal. Les crises font partie de la vie. En général, on réussit à remonter la pente par ses propres moyens au bout de quelques heures ou quelques jours – surtout si on agit activement. Mais si la spirale des pensées négatives se poursuit pendant des semaines, elle peut se transformer en dépression. La frontière entre la santé psychique et la maladie psychique est subtile. Le bien-être psychique peut être comparé à une balance: d’un côté, les contraintes. De l’autre côté, les choses qui font du bien et redonnent de l’énergie, également appelées ressources. Quand les contraintes prennent le dessus, on glisse dans la déprime. Il est alors important de faire rapidement le plein de ressources pour retrouver l’équilibre. D’ailleurs, une fois l’équilibre rétabli, nous supportons mieux les contraintes. Il est donc très important de renforcer nos défenses psychiques, y compris quand tout va bien. 

Laisser la déprime derrière soi

Tristesse, irritabilité, baisse d’énergie et pensées qui tournent en boucle: «Si ces signes ne disparaissent pas d’eux-mêmes au bout de deux jours, il faut s’y attaquer activement», conseille Liliana Paolazzi, de la fondation Pro Mente Sana, qui s’engage depuis plus de 40 ans en faveur de la santé psychique. «Nous ne sommes pas à la merci de nos émotions. Nous pouvons agir pour changer les choses.» 

Acceptez-vous vous-même!

«S’accepter comme on est – pour moi, c’est l’étape la plus importante», explique Liliana Paolazzi. Mais ce n’est sûrement pas la plus facile. Il faut de l’entraînement pour assumer ses propres faiblesses et accepter que la vie est faite de hauts et de bas. «Apprenez à rire de vos erreurs et concentrez-vous sur vos points forts.»

Conseil: chaque soir, notez trois choses que vous avez réussies. Par exemple, si vous avez bien réagi lors d’une réunion ou si vous avez réussi la sauce pour les pâtes. Notez également trois choses que vous avez appréciées aujourd’hui. Cet exercice vous ouvre les yeux sur les choses qui vous font du bien. 

Ayez le courage d’en parler!

Parler de ses soucis fait du bien. Déjà, parce que l’on doit formuler ses pensées à voix haute. Cela permet de faire le tri. «Vous ne pouvez cependant pas exiger des autres qu’ils remarquent votre état émotionnel», avertit Liliana Paolazzi. C’est à vous de chercher la conversation. Cela nécessite parfois du courage – ce qui nous ramène à notre premier conseil: accepter ses propres faiblesses.

Conseil: faites appel à une personne en qui vous avez confiance. Cela peut être vos meilleurs amis, mais pas forcément. Il est parfois plus facile de parler à quelqu’un de moins proche. 

Faites de l’exercice!

Autre conseil de Liliana Paolazzi: «Bougez!». En effet, il est prouvé que l’activité physique et le sport sont bons pour le moral. Ils contribuent à éliminer les hormones du stress que sont le cortisol et l’adrénaline et stimulent la production des hormones du bonheur, l’endorphine et la sérotonine. Le sport améliore en outre la condition physique et favorise la confiance en soi. 

Conseil: il n’est pas forcément nécessaire de faire une séance de jogging ou de fitness. Toute forme d’exercice physique fait du bien. Choisissez quelque chose qui vous plaît. Intégrez également de l’exercice physique dans votre quotidien. Prenez l’escalier au lieu de l’ascenseur, et le vélo au lieu de la voiture. 

Apprenez quelque chose de nouveau!

Entretenez votre activité mentale et votre curiosité. Vous élargissez ainsi votre horizon et renforcez votre confiance en vous. Liliana Paolazzi le confirme: «Quand on apprend quelque chose de nouveau, on reste inspiré, on peut ouvrir les yeux sur d’autres choses dans la vie.»

Conseil: trouvez ce que vous aimeriez apprendre. Une langue étrangère? Quelque chose en lien avec l’art? Vous ne devez pas forcément suivre une formation: vous pouvez participer à un séminaire en ligne, télécharger une appli ou vous inscrire à une visite guidée. 

Entretenez vos amitiés!

Des études ont montré qu’avoir des amis est bon pour la santé et réduit le risque de dépression. Les échanges avec d’autres personnes ont également une influence sur notre perception de nous-mêmes. Liliana Paolazzi le confirme: «Les autres nous répondent directement. Quand vous souriez à quelqu’un, la personne vous sourit en retour. Et cela vous rend plus fort.»

Conseil: planifiez du temps avec vos amis, vos collègues et votre famille – même si cela demande un effort après une longue journée de travail. Et efforcez-vous de sourire et d’être aimable pendant toute une journée. Observez les réactions.

Faites-vous aider!

Il n’est pas toujours facile de demander de l’aide et de l’accepter. Liliana Paolazzi relativise: «C’est faire preuve de responsabilité que de se soucier de sa propre santé psychique.» En cas de déprime, il n’est pas forcément nécessaire de se tourner vers un psychothérapeute. Souvent, il suffit de renoncer aux choses qui nous pèsent. 

Conseil: notez ce qui doit être fait et ce qui ne peut pas attendre. Que pouvez-vous déléguer? Peut-être pouvez-vous confier votre déclaration d’impôts à une comptable, le ménage de l’appartement à une aide-ménagère ou la gestion d’une liste Excel à un collègue? 

Reposez-vous!

Notre corps a besoin de repos pour se détendre et refaire le plein d’énergie. Mais attention: «Se détendre ne signifie pas rester des heures devant la télévision», précise Liliana Paolazzi. Rien n’interdit de regarder un film en soirée de temps en temps, mais cela ne remplace pas des moments de repos conscients. Le sommeil est en outre sous-estimé: la plupart des gens ont besoin de sept à huit heures de sommeil – Moins, c’est tout simplement trop peu dans la plupart des cas. 

Conseil: faites de votre temps libre une priorité et inscrivez-le à votre agenda, qu’il s’agisse d’une séance de sauna, de méditation ou de massage. Les mini-pauses dans la journée sont également utiles. Vous pouvez par exemple intégrer plusieurs pauses d’une minute au travail: inspirez pendant quatre secondes puis expirez pendant six secondes. L’expiration prolongée active le nerf de la relaxation, le système nerveux parasympathique. 

Sortez prendre l’air!

L’air frais dans la nature a un effet positif sur le moral. De nombreuses personnes l’ont déjà constaté, et différentes études l’attestent. Ainsi, une étude de l’University of Michigan publiée en 2019 a montré qu’il suffit de 20 à 30 minutes au vert pour réduire considérablement le taux de cortisol, l’hormone du stress, dans le sang. La nature a un effet relaxant. 

Conseil: associez plusieurs stratégies: faites du sport dans la nature, retrouvez des amis pour pique-niquer ou parlez de vos soucis lors d’une promenade. 

Chacun se ressource à sa propre manière. L’important est de savoir ce qui nous plaît et nous fait du bien. Mais quand on est au creux de la vague, cela peut paraître impossible. La psychothérapeute Anna Beer-Heuberger le constate souvent: «De nombreux clients et clientes doivent d’abord prendre conscience de leur état. Prendre conscience de son état et distinguer ses émotions semble parfois plus facile que la réalité.» Il peut être utile, pour ce faire, d’observer ses propres schémas de pensée et modèles comportementaux. Les mêmes pensées reviennent-elles sans cesse? Est-ce que je me retrouve dans la même situation que la fois précédente? Il est alors possible de remplacer les pensées négatives ou de les convertir en positif. Anna Beer-Heuberger conseille en outre de ne pas se fixer d’objectifs trop ambitieux. Les stratégies de sortie de la déprime doivent être concrètes et surtout réalistes. «Si, par exemple, je ne peux pas prendre immédiatement trois semaines de congés, peut-être que je peux demander trois jours.» 

Tout le monde ne tombe pas aussi bas 

On connaît tous des phases de déprime. «Mais certaines personnes y sont plus sujettes que d’autres», explique Anna Beer-Heuberger. Les causes sont diverses: il peut s’agir d’expériences difficiles dans le passé ou de l’influence de modèles comportementaux. Si les parents voient surtout le négatif, font trop peu de choses pour eux-mêmes ou ont tendance à être tristes, cela peut influencer l’enfant et sa capacité à gérer le stress. Les raisons d’un sentiment de frustration ou de détresse peuvent aussi venir de l’extérieur. La pandémie de Covid-19 est actuellement un sujet brûlant dans le cabinet de la psychologue: «Les restrictions actuelles provoquent un sentiment d’impuissance chez de nombreuses personnes.» Celles qui disposent de peu de ressources ont du mal à remonter la pente. 

Mais la déprime n’est pas déclenchée par un seul facteur, précise Anna Beer-Heuberger. La génétique, les ressources personnelles et l’environnement social jouent également un rôle. Si ces trois aspects sont plus ou moins marqués chez chaque personne, «je n’ai aucune influence sur la génétique. Par contre, je peux influencer ma façon de percevoir les choses et d’organiser ma vie quotidienne et mon environnement social.» Cette prise de conscience est essentielle pour sortir de la paralysie et se remettre en mouvement. Si la déprime dure, il est conseillé de demander de l’aide à un professionnel, souligne la psychologue. Mais elle insiste: «Les baisses de moral sont normales. Nous devons apprendre à les supporter.»

Déprime ou dépression? Quelle est la différence?

Une déprime est une période de mauvais temps émotionnel momentanée, qui dure de quelques heures à quelques jours. C’est une réaction normale au stress. Une dépression, quant à elle, est un trouble psychique qui se manifeste sur une longue période ou de manière récurrente. Les personnes souffrant de dépression ont du mal à faire face à la vie quotidienne et ont une résistance au stress limitée ou nulle. On distingue plusieurs degrés de dépression, allant de léger à grave. Les symptômes typiques sont les suivants: 

  • Abattement et apathie
  • Manque d’intérêt, tristesse confinant au vide intérieur
  • Insomnie et manque d’appétit
  • Perte de libido
  • Morosité permanente pouvant aller jusqu’au désespoir
  • Épuisement émotionnel, mental et physique
  • Problèmes de concentration
  • Sentiment de culpabilité et d’inutilité
  • Estime de soi et confiance en soi érodées
  • Pensées suicidaires

Les personnes qui ressentent ces symptômes ou des aspects de ces symptômes pendant plus de trois semaines devraient consulter un psychothérapeute. 

Liliana Paolazzi a étudié la psychologie et est responsable du service spécialisé de conseil chez Pro Mente Sana. Pro Mente Sana est une organisation indépendante de santé psychique en Suisse. Elle conseille les malades, leurs proches et les professionnels pour toutes les questions psychosociales et juridiques concernant la maladie psychique et la santé. promentesana.ch

Anna Katharina Beer-Heuberger (M.Sc.) est psychologue spécialiste en psychothérapie (FSP) et psychothérapeute reconnue au niveau fédéral. Dans son cabinet de Zurich, elle conseille principalement des individuels et des couples. Elle est notamment spécialisée dans la dépression, le burn-out et les troubles de l’adaptation. 

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