L’infarctus du myocarde chez l’homme: ce qu’il faut savoir
Un infarctus du myocarde peut être fatal. Il nécessite donc une intervention rapide. Et, à titre préventif, un mode de vie sain. Surtout pour les hommes, qui sont plus exposés que les femmes.
C’est une situation que nous avons vue maintes fois à la télévision: un homme porte soudain sa main à sa poitrine avant de s’effondrer. Il s’agit d’un instant terrifiant et, pour de nombreux hommes, une angoisse latente qui les accompagne tout au long de leur vie. Car l’infarctus du myocarde peut s’avérer fatal. Et parce qu’on a l’impression de ne plus rien contrôler. On entend dire qu’un infarctus du myocarde peut survenir n’importe où et n’importe quand. Et toucher tout le monde. Vraiment? Que peut-on faire pour le prévenir?
Thierry Carrel, qui est très certainement le chirurgien cardiaque le plus renommé de Suisse, tempère: «90 à 95% des personnes transportées rapidement à l’hôpital survivent à un infarctus du myocarde.» On recense 30 000 accidents coronariens aigus chaque année en Suisse. Les maladies cardio-vasculaires constituent une cause de décès fréquente. Il faut toutefois relativiser: la probabilité qu’une personne ne présentant aucun risque subisse un infarctus du myocarde au cours de sa vie est inférieure à 5%. En bref: oui, un infarctus du myocarde peut arriver, mais ne devient pas forcément une préoccupation de tous les instants avec une bonne prévention, un peu de vigilance et un suivi médical régulier.
Le chirurgien, qui est également professeur de chirurgie cardiaque à l’université de Zurich, ajoute: «Après un infarctus, il reste souvent une cicatrice, car le tissu touché est nécrosé et une partie de l’organe contractile du cœur ne peut plus réaliser pleinement son action de pompage.» Que l’on en ressente les effets après un infarctus dépend de l’infarctus lui-même, de sa gravité et de sa localisation.
Les hommes sont plus vulnérables que les femmes, à cause des hormones
L’infarctus du myocarde touche beaucoup plus souvent les hommes que les femmes. Pourquoi? Parce que les hommes vont consulter plus rarement et plus tard. Ils ont aussi davantage fumé au cours des dernières décennies et souffert du stress au travail. «Je suis curieux de voir comment le mode de vie des hommes et des femmes, notamment en ce qui concerne le rôle au travail et la prise de conscience de sa propre santé, impactera l’évolution du taux d’infarctus dans les décennies à venir», commente le chirurgien.
Les femmes sont naturellement plus à l’abri d’un infarctus que les hommes jusqu’à un âge moyen. Grâce aux hormones. Le professeur ajoute: «Les œstrogènes présents dans l’organisme féminin ont un effet protecteur sur les veines cardiaques et ralentissent le processus de vieillissement de la paroi cardiaque. La testostérone, en revanche, est souvent associée à un risque accru d’infarctus du myocarde.» Il a déjà vu des infarctus chez des trentenaires, mais qui présentaient souvent des facteurs de risque, par exemple une hypercholestérolémie familiale. La fréquence des infarctus chez les hommes augmente fortement entre 50 et 60 ans.
À cet âge-là, c’est surtout le stress et une mauvaise alimentation qui favorisent leur apparition. Car les vaisseaux sanguins vieillissent, tout comme le corps lui-même, et le cœur souffre lorsqu’une personne ne prend pas suffisamment soin de sa santé. S’il est impossible d’exclure tout risque d’infarctus, même en menant le mode de vie le plus sain possible, on peut néanmoins le minimiser activement: en mangeant sainement, en évitant de fumer et de s’énerver, en faisant de l’exercice. «Il est facile de savoir si une personne a un mode de vie malsain ou non», précise le chirurgien.
Mieux vaut consulter suffisamment tôt, notamment à partir de 50 ans
Les antécédents familiaux doivent également être pris en compte. Thierry Carrel: «Il existe une composante héréditaire. Il est donc conseillé de vérifier si des membres de la famille ont déjà souffert de maladies cardiovasculaires. Et à partir de 50 ans, il est judicieux de faire un check-up.» Quoi qu’il en soit, mieux vaut se rendre chez le médecin trop tôt que trop tard. L’ECG d’effort, qui enregistre la réaction du cœur au cours d’un exercice physique soutenu, constitue un élément central de l’examen. «Il ne s’agit pas d’une mesure définitive, mais elle fournit de bonnes indications», déclare Thierry Carrel.
Tous les infarctus ne surgissent pas comme un éclair qui déchire le ciel et ne se manifestent pas de manière aussi dramatique que les films veulent bien nous les montrer. «Ce que l’on voit à la télévision, c’est l’infarctus clinique du myocarde dont les symptômes classiques sont: de fortes douleurs dans la poitrine, qui irradient dans le bras gauche ou la mâchoire, et plus rarement dans la partie supérieure de l’abdomen.» Des douleurs qui ne disparaissent pas spontanément. En cas de crise aiguë, elles peuvent être lancinantes et sourdes. La personne touchée les ressent clairement, la plupart du temps après un effort. Il ne faut pas confondre l’infarctus du myocarde avec une angine de poitrine, qui se manifeste par une sensation d’étau ou une douleur dans la poitrine lors d’un effort important – et qui disparaît au repos. Si ce n’est pas le cas, cela peut être un signe d’alarme. Il est donc recommandé de procéder à un examen médical lorsque ces symptômes apparaissent.
Outre l’infarctus du myocarde et l’angine de poitrine, il existe un autre type d’accident cardiaque: l’ischémie myocardique silencieuse. Dans ce cas très particulier, le patient ne remarque rien, car les zones du muscle cardiaque touchées sont généralement petites. Mais cette ischémie silencieuse peut également provoquer une nécrose partielle du myocarde en raison d’une obstruction d’une artère du cœur. «Bien souvent, c’est lors d’un ECG effectué chez le médecin que le patient découvre qu’il a été touché par un infarctus», indique Thierry Carrel. Il conseille donc de se faire contrôler trop que trop peu. Cela s’applique également au dépistage précoce. «À long terme, l’absence prolongée d’une personne à la suite d’un infarctus coûtera bien plus cher à la collectivité que si cette même personne s’était soumise à des contrôles réguliers», ajoute le médecin.
Ne pas céder à la panique en cas d’élancement
Car des facteurs psychosomatiques sont bien souvent à l’origine d’un élancement dans la poitrine. Le cœur est très sensible au stress et réagit en conséquence. Et peut parfois «défaillir», même chez les personnes en bonne santé. «Les arythmies cardiaques sont très fréquentes, poursuit le professeur, car le circuit électrique qui régule le rythme cardiaque est extrêmement sensible. Et il réagit au stress, aux émotions, à la météo et à une multitude d’autres facteurs.» Nombre de personnes vivent avec des arythmies sans que cela ait une quelconque importance sur le plan cardiologique. La plupart d’entre elles sont anodines, mais désagréables. «Elles peuvent toutefois faire peur», souligne Thierry Carrel. C’est pourquoi il faut dans tous les cas clarifier les symptômes et exclure tout problème sérieux, avant de prendre le mal à la racine et réduire le stress.
Portrait de l’expert
Thierry Carrel, 63 ans, est chirurgien cardiaque et professeur d’université. Il a dirigé la clinique de chirurgie cardiaque et vasculaire au sein de l’hôpital de l’Île à Berne de 1999 à 2020. Il est actuellement chirurgien cardiaque à l’hôpital universitaire de Bâle et professeur de chirurgie cardiaque à l’université de Zurich.